Les illusionnistes du développement personnel

par | Nov 3, 2021 | Développement personnel

Article écrit en 2019 (et remanié ici) mais qui a encore toute sa place…

Attention, sujet sensible et polémique qui risque d’en faire bondir plus d’un !
Depuis des mois, des mois et des mois, je suis littéralement atterrée par ce que je vois et observe. Je ne peux plus rester sans rien dire, bouche bée devant tout ce charlatanisme.

Le mot est fort, mais c’est à dessein.

Initialement, je voulais utiliser le terme « imposteur ». En vérifiant la définition, ça ne collait pas vraiment, même s’il y avait du vrai dedans. Alors, entre l’escamoteur, le prestidigitateur et l’imposteur, j’ai choisi l’illusionniste qui seyait mieux.

L’illusionnisme est un art du spectacle qui consiste à créer des illusions par des trucages ou des tours de prestidigitation, à tromper le regard du spectateur par dextérité manuelle ou à l’aide d’appareils spécialement conçus dans ce dessin et appelés « grands trucs », dixit le dictionnaire.

Notre illusionniste est donc un véritable artiste assez astucieux et ingénieux (ou qui se prend pour tel), et qui leurre grâce à son habileté et ses boniments.

Quant au développement personnel, comment le définir (vaste sujet qui mériterait bien un article) ?

Pour faire simple et concis, on dira que c’est un ensemble de pratiques et courants de pensée dont la finalité est la découverte de soi pour mieux vivre et s’épanouir dans sa propre existence.

Cela existe depuis que le monde est monde, mais tel qu’il est vu et conçu aujourd’hui, il découle du mouvement de la contre culture américaine des années 60 (recherche de la connaissance de soi, redécouverte du rapport à l’autre, à son corps ou rapprochement avec la nature). De nouvelles méthodes thérapeutiques pour favoriser l’épanouissement personnel voient le jour, puis le mouvement New Age naît.

Rien de négatif en soi ou de dangereux à vouloir se faire du bien, au contraire !

Néanmoins, quand on va mal ou qu’on ne sait plus où on en est, on est plus fragile et plus sensible. On est donc plus à même de faire de mauvais choix et tomber sur des personnes plus ou moins compétentes et plus ou moins bien intentionnées (autant éviter les mauvaises expériences, même si elles permettent d’évoluer, car elles peuvent aussi faire beaucoup de mal).

Venons-en aux faits.

Depuis plusieurs années, le secteur du développement personnel a littéralement explosé.

Tous les mois, en librairie, les nouveautés affluent. Les salons bien-être, zen et autres ne se comptent plus et les « formations » pullulent. Du jour au lendemain quasiment, des écoles en veux-tu en voilà sont apparues. Elles utilisent des outils marketing dignes des plus grandes multinationales, du tape à l’oeil, un discours commercial bien rôdé et parfois des prix exorbitants. C’est un business comme un autre et certains l’ont bien compris avec tout compte fait, peu d’intérêt pour leurs pairs. Dès qu’un secteur a le vent en poupe, ça y est, on s’y engouffre pour faire son beurre au détriment de toute déontologie.

Par ailleurs, beaucoup de personnes en manque de sens, en profond questionnement, ayant envie de changements, font un virage à 360° en se dirigeant dans ce secteur d’activité. Quelques jours de « formations » parfois suffisent et elles se lancent, sans rien connaître de leurs propres problématiques, sans avoir été elles-mêmes accompagnées, sans aucune connaissance psychologique de la nature humaine.

Elles peuvent être tout à fait bienveillantes et de bonne volonté, mais face à quelqu’un en souffrance avec un parcours de vie complexe et avec des blessures parfois très profondes (sans compter les profils psychiatriques et les personnes malades), il faut être « armé », connaître ses limites et ne pas faire n’importe quoi.

On peut faire du mal sans le vouloir. Etre empathique, humaniste ou intuitif, ne suffit pas !

NON, NON et NON, avant d’accompagner une personne en difficultés, il est impératif d’avoir soi-même été mettre les pieds dans sa propre merde et d’avoir affronté ses propres peurs, souffrances ou contradictions.

Entre la théorie et la pratique, il y a un monde. On ne devient pas un pseudo spécialiste de l’être humain après quelques semaines de formation.

Je ne suis pas là pour dénoncer des personnes en particulier, chacun se fera son propre avis sur la question, mais par pitié, arrêtons cette mascarade qui peut fragiliser voire détruire des personnes déjà instables et surtout, parlons-en.

Si j’entends les mots suivants : rentabilité, compétitivité, performance réussite, je trouve ça tout de suite suspicieux et allant à l’encontre de la dimension humaine. Pour moi, c’est un vocabulaire économique et lié à la société de consommation et non pas à l’accompagnement en développement personnel.

Et c’est ainsi qu’on retrouve du marketing de réseau (sans que ce ne soit explicitement nommé), des shows à l’américaine et pléthore de méthodes souvent brevetées.

Je reste persuadée qu’il n’y a rien de nouveau là-dedans et que dans certaines cultures ces disciples existaient déjà (peut-être de façon empirique ou sous une forme ou appellation différente), généralement transmises par une personne initiée dans le cadre de pratiques communautaire ancestrales.

Certaines régions (Mongolie, Sibérie, Gabon, Pérou, Inde…) ont vu un « tourisme chamanique » se développer avec parfois, à la clé, des expériences initiatiques utilisant des plantes psychotropes (ayahuasca ou iboga par exemple,) sans réel encadrement derrière. On peut ne jamais s’en remettre et en garder des séquelles psychologiques à vie.
Pêle-même et en vrac, voici un panel de disciplines qui ont suscité l’engouement :
– le coaching,
– l’hypnose,
– le massage
– la sophrologie,
– la naturopathie,
– la kinésiologie,
– le reiki,
– le yoga,
– la méditation,
– le chamanisme,
– le rebirth,
– l’EMDR ou Eye movement desensitization and reprocessing,
– l’EFT ou Emotionnal Freedom Technique,
– la PNL ou programmation neurolinguistique,
– l’analyse transactionnelle,
– la CNV ou communication non violente,
– la loi de l’attraction,
– la pensée positive,
– les constellations familiales…
On pourrait y rajouter la déprogrammation cellulaire, la régression dans les vies antérieures, la communication avec ses guides, ses anges ou les êtres de lumière et bien d’autres encore.
Je pourrais évidemment ajouter les soins énergétiques et la psychogénéalogie que j’utilise dans le cadre de ma pratique de thérapeute.

Chaque technique a ses bienfaits, mais aussi sa dangerosité si elle est mal utilisée. Je ne crache sur aucune (ma nature de chercheuse et de curieuse me pousse à m’y intéresser), mais attention à qui l’utilise, comment, pourquoi et avec quel bagage.

Il y a de nombreuses dérives et si la Miviludes surveille de près ces activités, c’est à juste titre.

On consomme du développement personnel comme on consomme de la junk food ou du sexe et on ne sait plus vraiment ce qui relève de la démarche de développement personnel ou pas.

Par pitié, ouvrez les yeux car entre la manipulation mentale, le culte de l’image ou les egos démesurés, les pseudo-gourous surfent sur la vague.

Attention !  La règle est de toujours garder un oeil critique et ne pas prendre tout pour argent comptant.
Ne croyez pas tout ce qu’on vous dit, soyez curieux, informez-vous, posez des questions et surtout, écoutez-vous .

Certaines pratiques ne seront pas adaptées pour vous, certaines personnes vous correspondront mieux que d’autres, mais dans tous les cas, si vous avez un doute, n’y allez pas. Ne foncez pas tête baissée vers quelqu’un qui vous fera miroiter le changement et la guérison en 2 temps 3 mouvements, car ce n’est pas possible. Le chemin est long et on ne change pas en un claquement de doigts. On évolue au fil du temps et des expériences de la vie.Travailler avec l’autre, sur ses souffrances, demande de vraies compétences qui ne s’inventent pas ou ne s’improvisent pas.

Qu’on se le dise…